Thomas Perazzi : Le vintage, passion rétro

Thomas Perazzi : Le vintage, passion rétro

La déferlante vintage suscite une incroyable frénésie des collectionneurs dans les salles de ventes aux enchères. Thomas Perazzi, Head of Asia pour le département montres de Phillips, nous éclaire sur la tendance.

Qu’est-ce qu’une montre vintage ?
L’appellation vintage s’applique aux montres qui ont plus de 20 ans. En réalité, il s’agit essentiellement de montres bracelets produites entre les années 1930 et les années 1980. Ce sont des pièces qui ne sont plus en production aujourd’hui dans les maisons horlogères et dont le degré de rareté est important parce qu’elles ont été produites en petites quantités, par milliers, centaines voire seulement quelques dizaines d’exemplaires.

Comment expliquez-vous que le vintage rencontre aujourd’hui un tel succès auprès des amateurs d’horlogerie ?
Très certainement parce que la montre est considérée comme un objet d’art. A l’instar d’un tableau qui repose sur la combinaison d’une technique artistique et d’une originalité esthétique, les montres issues du génie horloger suisse accèdent au statut d’objet d’art. Elles s’inscrivent dans l’histoire de l’industrie, elles transcrivent une quête de qualité, un design et une technicité. Sans compter qu’il s’agit d’objets dont la rareté n’est plus à démontrer. Le marché a viré fortement au tournant des années 2000 grâce à internet et à l’importante diffusion de l’information horlogère. Jusqu’alors, les maisons horlogères n’avaient pas vraiment saisi l’intérêt de communiquer sur leur patrimoine. Aujourd’hui, le public a tout pour comprendre l’importance des montres bracelets du 20e siècle.

A quoi les collectionneurs sont-ils attentifs quand ils cherchent à acquérir une pièce vintage ?
Je dirais que trois éléments contribuent au succès des pièces vendues aux enchères. En premier lieu, la qualité de la montre est essentielle. Elle ne doit pas avoir été restaurée, le cadran doit être d’origine, sans tache, sans rayure, le boîtier non repoli. L’état de préservation est un élément incontournable. La rareté, bien sûr, est aussi une caractéristique principale. Enfin, la provenance de la montre a également un rôle majeur à jouer. Si elle a appartenu à un personnage célèbre, un acteur ou une actrice, une personnalité politique, il est certain que la montre va attiser l’intérêt des collectionneurs. Il ne faut pas oublier que dans un achat, l’élément passion est essentiel.

En dehors des montres exceptionnelles qui battent tous les records aux enchères, quels sont les modèles ou les marques auxquels les amateurs sont susceptibles de s’intéresser dans un avenir proche ?
Il est évident que l’on souligne toujours les grands records de vente mais il existe en effet un vaste choix de montres prisées par les amateurs disposant de budgets de CHF 5’000.– à 15’000.– . Je pense notamment à certaines références en acier produites par Omega, Movado, Eterna ou Longines dans les années 40/50. Ces chronographes créés pour un usage aéronautique ou pour la course automobile présentent un design sportif avec des diamètres de boîtier qui s’inscrivent dans la tendance actuelle. Une certaine catégorie de collectionneurs se positionne sur ces pièces qui sont parfaitement portables au quotidien.

La montre vintage est-elle un bon investissement ?
Oui, tout à fait, pourvu que cela soit fait intelligemment. On a certes constaté d’importantes hausses de prix ces dernières années mais il faut très bien connaître le marché. D’infimes détails peuvent engendrer de très grosses différences de prix. Si un cadran a été modifié, si un boîtier a été repoli, si le bracelet n’est pas d’origine, l’incidence sur la valeur peut être énorme. Il est donc important de se référer à un spécialiste.

D’un point de vue plus personnel, pour quelle montre vintage seriez-vous prêt à vous damner ?
Mon rêve, ce serait la Rolex Paul Newman ayant appartenu à l’acteur en personne. Ou alors une montre portée par un astronaute lors de la conquête de l’espace. En somme, une montre qui raconte une histoire.

Trois règles en or pour ne pas se tromper

Règle numéro 1 : ÊTRE CURIEUX Le plus important est de bien se renseigner en amont. Il est fortement conseillé de se rapprocher de quelqu’un du métier ou d’un collectionneur. Il est aussi possible de prendre contact avec les maisons de ventes aux enchères ou de s’adresser directement aux manufactures. Faire appel à l’expertise d’un détaillant peut également être une excellente manière d’obtenir les informations recherchées.
Règle numéro 2 : OUVRIR L’OEIL, LE BON Avant de se lancer tête baissée dans un achat, il faut être extrêmement attentif à la qualité de la pièce, à son état de conservation. Pour justifier sa valeur, la montre doit être propre, sans taches, avec ses éléments d’origine.
Règle numéro 3 : ÊTRE MÉFIANT Il est essentiel d’avoir conscience que ce n’est pas au marché aux puces que l’on réalisera l’affaire du siècle. Avec internet, les vendeurs sont aujourd’hui très bien informés sur leur marchandise. Attention également aux contrefaçons de montres vintage. Une affaire trop alléchante doit renforcer la vigilance de l’acheteur. En cas de doute, se rapprocher d’un professionnel reste la solution la plus sûre.


Thomas Perazzi, Head of Asia pour le département montres de Phillips – photo : Clarissa Pearson Bruce